lundi 10 juin 2013

Sainchand - Oulan Bator






Nous voila repartis dans le desert, charges comme des mulets. Cette fois on ne se fait pas avoir, on prend a bouffer pour un regiment histoire d'eviter la famine.
La portion Sainchand - Choir est en cours de goudronnage, selon un ingenieur ecossais croise en chemin ca devrait etre termine fin aout. Mais en attendant la route est le plus souvent impraticable, de gros tas de terre sont regulierement depose au milieu pour empecher voitures et camions de passer (mais a velo on peut parfois passer en empruntant des passages techniques), et on se retrouve a rouler la plupart du temps sur la piste, qui longe la route. Et qui longe egalement la voie de chemin de fer, depuis Sainchand. Le transmongolien nous tiendra compagnie jusqu'a Oulan Bator.



Le vent nous laisse tranquille (on l'a meme un peu dans le dos) pendant une journee et demi, et on fait plus de 200 bornes sans s'epuier. Le lendemain matin, la tente se tord sous les raffale. "Celui la si on l'a dans le dos on est a Oulan Bator ce soir!". Mais non mais non, en sortant de la tente on s'apercoit bien vite que ce bon vieux vent du nord est revenu en fanfare. On se retrouve donc a forcer comme des anes sans avancer.







Deux rayons cassent sur ma roue arriere. Un rapide coup d'oeil me permet de me rendre compte que je suis mal : les rayons brises sont cote cassette, et on n'a pas l'outil pour demonter la cassette - pas moyen d'en monter des neufs. Et pas question de rouler comme ca, la roue est completement voilee, et bien fragilisee. Aie aie aie, je commence deja a dire a Vico "bon ben au pire j'arrete un camion et je me fait enmener jusqu'a la prochaine ville." Mais Vico, toujours plein de ressources, a la bonne idee du jour : "Pourquoi t'essayerai pas le methode indienne?" En inde, pour le meme genre de probleme j'etais alle faire reparer ma roue par un specialiste. Mais les velos indiens n'ont pas de vitesses, et mon specialiste n'avait pas plus le precieux outil que nous. Qu'a cela ne tienne, on prend le rayon, on tord le bout et on crochette le rayon voisin, plutot que de le fixer au moyeu. Et puis roulez jeunesse! Il nous avait bien fait marrer cet indien avec sa technique de sauvage, mais voila que cette meme technique me sauve la mise dans le desert. J'arrive a devoiler et je n'ai plus qu'a prier pour que ca tienne.




On finit par arriver a Choir, on a mis toute la journee pour boucler les 40 km qui nous separaient de la ville, et on arrive sur les rotules. On s'effondre dans le seul hotel du village ou on paye une blinde pour une chambre minable sans douche. Mais bon on a vraiment plus de forces. Le soir, deux ivrognes s'infiltrent dans notre chambre et se mettent a picoler sur notre table. Rien de plus normal, visiblement. On arrive a les mettre dehors et on ferme a clef. Mais regulierement, des gens viennent toquer a notre porte histoire de nous observer de pres.




Le lendemain on part a la recherche d'un distributeur, avant d'aller faire de nouvelles provisions. La machine ne veut pas me donner de biftons, je re-essaye. Mauvais choix : la machine me mange ma carte. A force de demander de l'aide au gens qui passent autour (les mongols ne sont pas toujours prompt a donner un coup de main), un banquier tombe du ciel. Avec de nombreux signes et quelques mots d'anglais, il m'explique que je ne peux pas recuperer ma carte avant trois jours. Il ne semble pas que ce soit une arnaque, et on decide d'attendre trois jours, que l'ATM veuille bien recracher ma carte.


Nous voila bloques a Choir, ville ou on pourrait aisement tourner un western : du sable partout, toujours du vent, des maisons bancales et rafistolees avec de la taule. On se degotte un billard, dans une cave. Depuis la Chine le billard est devenu notre passe temps favoris. Sur la chaine de sport chinoise, on a pu voir de nombreux matchs de Ronnie O'Sullivan, le maitre inconsteste de la discipline, champion du monde a maintes reprises. Alors on s'entraine pour avoir le niveau de Ronnie, mais il nous reste encore un peu de chemin. Il y a egalement deux tables de ping pong dans la cave et des le premier soir Vico se fait defier par la championne du coin pendant que je terasse un papy. Les mongols aiment bien se mesurer a nous au ping pong, au billard on n'a pas encore le niveau...


Il n'y a vraiment rien a faire dans ces petits bleds au milieux du desert. Et d'ailleurs beaucoup de gens ne font visiblement rien. Beaucoup d'hommes s'envoient des bouteilles de vodka, ils feraient probablement mieux de ne rien faire. Et on se demande bien comment ces gens vivents pendant l'hiver, durant lequel les temperatures descendent jusqu'a -40. Nous on passe trois jours au billard ping pong.


Je recupere ma carte, pas d'entourloupe. On repart et devinez quoi? Le vent est de face. On n'en peux plus, rien que le bruit assourdissant dans les oreilles nous insuporte. On decide de se poser sous la voie ferree en attendant la nuit - le vent tombe parfois la nuit. Paris gagnant, le vent tombe et on en profite pour rouler a fond. L'inconvenient de rouler a fond de nuit, c'est qu'on peut se faire surprendre par la route. Alors que je suis devant le nez dans le guidon, je vois un nid de poule au tout dernier moment. Je met un coup de guidon juste a temps pour l'eviter, mais vico bien cale dans ma roue n'y voit que du feu et ne devie pas sa trajectoire d'un millimetre. Il prend le trou de plein fouet, se brise les valseuses et perd le controle de sa monture. En bon equilibriste il parvient a sauter a terre et rester sur ses pieds pendant que le bolide finit sa course dans la steppe. Mais ca a vraiment cogne fort et sa roue arriere fait vraiment la gueule : elle n'est plus tout a fait circulaire, mais legerement elliptique. C'est pas le top quoi.


Maintenant on prie chacun pour sa propre roue arriere, esperant que celle de l'autre explosera en vol en premier. Les paysages verdissent, on quitte petit a petit le desert pour etre maintenant dans la steppe. Le terrain est un peu vallonne, finit les etendues plates a perte de vue. On renoue tranquillement contact avec la civilisation : la route est maintenant totalement goudronnee et les villages de plus en plus nombreux a mesure qu'on se rapproche d'Ulaan Baatar. Et cela a une consequence que l'on avait pas prevu : les bouteilles de vodka vides sur le bas cote. Leur nombre est impressionnant. Pour passer le temps on les compte sur 4 km. Vous avez une idee? Allez, tentez un nombre! Et on ne compte pas les mignonettes hein?! Pas la biere, le vin le wisky! Non non non, que les bouteilles de vodka de taille normale. Alors? Deux cent vingt huit bouteilles, sur 4 bornes au milieu de la steppe...



On croise maintenant un bled par jour au moins. On se fait assaillir par un gang de gosses a velos, qui nous enmenent a la yourte hantee du village. Pas de chance, les fantomes ne sont pas la aujourd'hui.
Termine la ligne droite sur des dizaines de kilometres, avec les collines la route est bien plus sinueuse. Mais le vent en revanche, pas termine. Alors suivant la direction de la route on est aux anges ou en enfer. On monte des cotes a 40 km/h ou on force en descente pour maintenir un pitoyable 7 km/h, suivant que le vent soit notre allie ou non. Au fond de la vallee on apercoit Oulan Bator. Le traffic se densifie, et la conduite mongole est ... musclee. Et connaissant leur gout pour la vodka au volant on n'est pas rassures. Avec le vent les appels d'air sont terribles, Vic frole la correctionnelle au passage d'un camion. Il finit dans le fosse, sans mal mais pas franchement de bonne humeur.





Ulaan Baatar, enfin! On commencait a vraiment avoir hate d'y etre. A l'image des villages croises sur la route, la capitale mongole n'est pas vraiment belle. Elle est meme assez, voire franchement moche.
Il nous faut faire notre visa russe. Il coute cent euros et il faut 2 semaines pour le faire, que du bonheur. Notre visa mongol sera perime dans deux semaines, alors il faut faire une demande d'extension du visa mongol pour pouvoir avoir le temps de faire le visa russe.


C'est parti pour l'office d'immigration, qui est a 15 bornes du centre ville. C'est couvert mais il fait doux, je pars en chemise (le style avant tout). Vico, plus prevoyant sur ce coup, prend son K-way. Evidement en chemin il se met a pleuvoir. Une pluie glacee. On s'abrite sous un arret de bus mais ca n'a pas l'air de vouloir passer alors on y retourne. La pluie est de plus en plus glaciale, l'air se refroidit. On s'arrete dans un petit market, la vendeuse me prend en pitie et m'offre un sac poubelle k-way. On repart, la pluie s'est transformee en neige. La temperature est tombee de 15 ou 20 degres en deux heures! On se refugie dans un gymnase ou a lieu un tournoi de volley ball. On se prend de passion pour la quatrieme division de volley ball feminin mongol le temps de se rechauffer, mais il faut repartir sous la neige. On trouve l'office d'immigration . . . ferme. Il est trop tard. Y'a plus qu'a rentrer bredouille, en serrant les dents.




Le lendemain on obtient notre prolongation (on est venu en polaire-manteau-bonnet-gants) et on laisse notre passeport entre les mains des russes. Pendant quelques jours c'est repos et reparation des montures. On rencontre des cyclos belges (les Belgian Solidarity Bikers!) qui font le meme genre de trajet que nous, et nous conseillent un detour par le parc Terelj. On decide d'utiliser notre temps libre pour aller y faire un tour. Faut dire qu'Oulan Bator n'est pas une ville tres agreable, il n'y a pas beaucoup de choses a voir ou a faire. Et on ne se sent pas toujours tres en securite, il ne vaut mieux pas roder dans des coupes gorges la nuit! On tente d'ailleurs deux fois de me faire les poches (mais je veille!). Et un peu plus tard, alors qu'on traverse la banlieue avec nos velos charges, un type (probablement totalement ivre) balance une pierre a Vic et le rate de 3 m. Je le vois se baisser a nouveau et ramasser deux nouveaux projectiles alors ni une ni deux, j'emploie la methode utilisee avec les chiens : j'appuie sur les pedales, je me deporte de sont cote de la route et je lui hurle dessus. Comme avec les clebars, ca le surprend! Et j'ai le temps de passer, tout en rentrant la tete dans les epaules pour eviter les pierres.
Nous voila donc sur la route du parc Terelj et (devinez quoi?) le vent nous souffle dans le nez. Vous devez vous dire que j'en fait bien beaucoup avec le vent, mais c'est que vraiment parfois ca a tourne au calvaire. Rien de pire pour nous saper le moral, nous mettre de mauvais poil, nous epuiser et surtout nous ralentir. Et comme en plus on se trompe de route, on perd une journee! On arrive fnalement au parc et on remercie les belges de nous l'avoir conseille. On est tout de suite conquis par le paysage. Une immense vallee ou serpente une large riviere, encadree par de superbes montagnes. Et tout ca avec des couleurs incroyables. Bon bref c'est autre chose qu'Oulan Bator, quoi.





Le soir on arrive au dernier village du parc, ou l'on rencontre deux francais qui nous invitent dans leur yourte. On discute un moment, ayant fait beaucoup de pays en commun. Ils nous filent leur carte mongole et nous indiquent les coins sympas a voir dans le parc. On reste alors deux jours a se ballader dans cette endroit magnifique. On se fait des buuz (genre de gros raviollis a la viande) sur le feu, avec des rayons neuf en guise de brochette.
















Mais il nous faut repartir, il y a un petit festival qu'on ne veut pas manquer a Ulaan Baatar. Alors on fait demi tour (et je n'ai pas besoin de vous dire dans quel sens souffle le vent...). Au Sundown festival on est les seuls occidentaux, et on passe une sacree soiree au milieu de la jeunesse mongole.
Retour a UB, ou on se pose dans une guest house ou les chambre sont des yourtes. Notre collocataire est un drole de Bulgare qui fabrique des velos couches a partir de vieux velos tout casses et de toutes sortes de dechets trouves, dans les villes qu'il croise. Les resultats sont impressionnants, et c'est sans depenser un kopeck. Il part ensuite quelques temps sur ses creations, puis les laisse a des gens rencontres, avant de recommencer dans une nouvelle ville, dans un nouveau pays. Tout ce qui se fait a base d'objets recuperes lui plait bien, et ce soir c'est travaux pratiques : on bois une biere avec le bulgare, puis on fait un rechaud a alcool avec les canettes!


















7 commentaires:

  1. Vous m'avez bien fait sourire!
    J'espère que vous allez réussir à défier les enfants mongols au billard avant de partir!
    Gros bisous
    Marion

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  2. Vos aventures nous donnent la banane à nous qui les vivons par procuration (on se marrerait sûrement beaucoup moins si on y était!)
    Merci de nous faire partager un bout du rêve.
    Gros bisous
    Laura

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  3. du vent et du vent
    de face souvent
    mais toujours vont en avant...

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  4. Encore un article bien ficelé,des photos qui donnent envie de prendre le large.
    Merci pour cette nouvelle mise à jour .
    Vous êtes courageux.C'est bien .Bravo!
    CM(Limoges)

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  5. Heureuse de retrouver vos aventures par le biais de votre blog.Courage et détermination sont votre devise,bravo! Victo, le saucisson sec et les rillettes commencent à se faire manquer?Bises.Nathalie

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  6. Bonjour mesdames et messieurs,
    Permettez moi de vous présenter une opportunité de fin d'année en beauté et en joie. Vous vous faites de souci pour les fêtes de fin d'année, vous avez envie de passer une noël mémorable et inoubliable. Je vous donne une opportunité de prêt rapide et fiable dans un court délais. N'hésitez pas, une seule adresse à contacter pour amples informations.
    E-mail: wilson.josue1947@gmail.com
    Merci de me faire confiance.

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  7. Salut, voici un petit déterrage qui vous fera surement repenser à votre épopée Mongole.
    Pouvez vous m'en dire plus ou m'envoyer des photos de votre réparation de rayons sans passer le perçage du moyeux. C'est toujours une technique de plus dans la boite à outils en cas de coups durs :)

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